samedi 28 décembre 2019

La première question est relative à la combustion.
Une combustion nécessite un apport d'énergie (c'est-à-dire en fait un déplacement d'énergie, puisque la somme de l'énergie constante depuis la création l'univers).
Au juste, qu'est-ce que de l'énergie–au point où j'en suis, je vois un mouvement de particules, possiblement des électrons.
Ce mouvement mécanique provoque la rupture des molécules. Carbone et oxygène se séparent–le CO2 partant vers le haut, atomes de carbone porté par les atomes d'oxygène ; le carbone isolé restant en bas, formant la partie carbonisée de la combustion.
Cette séparation moléculaire libère de nouveau des particules (électrons ?),  donc de la chaleur qui se diffuse mécaniquement. Cette propagation entraîne la combustion complète du combustible.

La seconde question est relative à la vie comme combustion.
La définition canonique de la vie est, il me semble, la capacité des organismes d'une part à se constituer, d'autre part à se développer, enfin également à se mouvoir et à se reproduire–avant vieillissement et dissolution.
En termes chimiques, il y a nécessité d'un apport d'énergie–moins externe qu'interne aux cellules de la reproduction. Ensuite, le mécanisme endogène suivra sa programmation, selon les lignes mécaniques inscrites dans l'ADN, selon une logique de réplication et l'extension. Pour ce faire, de nouveau de l'énergie sera nécessaire, produite par la gestion et la décomposition chimique (qui nécessite un apport d'énergie) des nutriments.
Le vieillissement est un phénomène d'usure, qui touche le mécanisme de réplication (dégradation progressive des telomères à force de duplications) et également le matériau même, dont une partie cesse de se reproduire, et s'use.

La mort est le stade où les éléments auto construits ne fonctionnent plus ensemble, à force d'usure et de décomposition locale. Elle est donc le résultat d'une longue chaîne de combustions, qui sont venus à bout du dispositif interne et/ou du contenent.

 La troisième question est relative à la pensée comme activité énergétique. Les cellules mémorielles, qui enregistrent les stimulations sensorielles, et associent en une sorte de programmation des schémas de réactions, sont tout autant soumises à la logique de l'énergétique et de la combustion, donc de l'usure (du contenu ou du contenant, ou du dispositif de mise en réseau).
La question de la conscience est directement liée avec le statut énergétique (faim, fatigue, intoxication, perturbations hormonales ou enzymatiques–donc bioélectrique). La conscience relève certainement d'un niveau méta, de mise en relation donc en classification des sensations premières, des liens entre celle-ci, de l'élaboration de liens nouveaux. une part considérable de la conscience relève de la répétition/confirmation, mais aussi du frayage semi aléatoire, par lesquels s'opèrent des mises en relation entre blocs mémoriels.
Tout ceci, de nouveau, relève de l'énergétique, de la chimie. Certaines molécules font obstacle, d'autres semblent faciliter ; rien de tout cela ne se fait sans que s'opère la combustion générale qui fournit au corps son énergie.

mercredi 25 décembre 2019


 https://www.lefigaro.fr/vox/societe/jean-marc-jancovici-l-allemagne-est-le-contre-exemple-absolu-en-matiere-de-transition-energetique-20191213


Vous ne croyez pas à la possibilité d’une transition énergétique à 100% vers le renouvelable?

(J-M Jancovici) "J’y crois tout à fait: il suffit de revenir à là où on en était en 1700, un monde à 100% énergies renouvelables, avec 500 millions d’agriculteurs. Est-ce que c’est possible? La réponse est oui. Est-ce que ce sera le monde actuel, avec 8 milliards d’habitants, consommant ce qu’ils consomment? La réponse est non. Le monde actuel repose sur les combustibles fossiles, qui ne sont pas renouvelables. On en aura un jour de moins en moins, c’est inexorable.


Pensez-vous que la transition énergétique puisse se faire sans douleur sur le portefeuille des classes populaires occidentales ou est-ce un mensonge?
Malheureusement, quand on regarde la physique, on se rend compte que même le niveau de vie d’un smicard est trop consommateur de ressources non renouvelables pour qu’on puisse le maintenir en l’état. Son niveau de vie n’a rien à voir avec celui d’un paysan, et même d’un baron du Moyen Âge. Il vit dans un appartement chauffé, a un poste de télévision, part en vacances, mange à sa faim, et mobilise un énorme flux de ressources pour sa consommation de produits de toute nature. À 8 milliards, se remettre dans un système compatible avec les limites de la planète ne pourra se faire sans un effort de tous, y compris des classes populaires. Certes les plus riches devront donner l’exemple et être sur le front, pas à l’arrière, mais tout le monde va devoir faire des efforts."



Pour ma part, je m'en tiens là en matière de réflexion écologique.

samedi 14 décembre 2019

Cette nuit, après lecture d'inédits de Baudrillard (peut-être inspiratoire, avec un peu Hume), une intuition sur le système: objet/pensée/société. Suscité par un T-Shirt avec un chat, dont la vue m'a empli d'une aise subite, donc à analyser. C'est la conversion d'une sensation/relation en pensée,  de la pensée en objet, et le fait que l'objet renvoie à un (possible) partage de la pensée (avec un autrui, par exemple concevant, fabriquant, arborant le t-shirt - ou avec moi même devenu moi pour autrui/moi en protant le T-shirt, ou juste en réceptionnant son impact sur moi) qui crée l'impression de rassurante reconnaissance. Il en fut de même des cathédrales. A un certain stade, l'objet est le partage de la pensée - son indice, matériel. Quand telle pensée passe de mode, l'objet perd sa destination (son partage matériel) et se dégrade - ou s'altère, il change d'"objet". Notre culture est matérielle - rien ne se dit ni ne restera de nos pensées que les objets qui les figurent. Et la pensée, hors la pure subjectivité pensante, c'est l'usage et le partage des objets, invoquant les sentiments de relation.

Ajoût (à une correspondante sur un forum) - sans doute à réécrire:

Un versant tout à fait remarquable de l'esprit français de grand style 70-80' - et reconnu comme tel, moins en France qu'à l'étranger, d'ailleurs, c'était Jean Baudrillard.

Après l'avoir pas mal lu il y a des années ses bouquins suggestifs et/car illisibles, et constaté qu'il était un peu trop tombé dans le domaine publique de la "culture populaire" ou journalistique autour de 1990-2000, je croyais sincèrement sa pensée dépassée en grande partie.
Or je viens de finir un livre d'Entretiens inédit - où, causant avec des amis de ses idées, il est beaucoup plus clair que dans ses essais.

Et je redécouvre avec étonnement et admiration que les lignes qu'il tenait, il y a 30-40 ans, sont archi-pertinentes pour évaluer le maintenant, plus que jamais.

C'est un peu tous les thèmes que vous mentionnez.
Sur les mouvements sociaux et le social qui "ne fonctionne pas" (c'est pour Baudrillard un point acquis!); sur l'informatisation et les réseaux (qui, à la majorité, ne servent à rien, sinon à "communiquer" du rien!);sur Bourdieu (dont les disciples produisent mécaniquement, comme par "simulation", des analyses que B. juge dépassées depuis les années 60); sur les féministes (qui enragent qu'on leur dise qu'il n'y a "ni perdants ni gagnants" dans le rapport des sexes, et qui tirent de la plainte une force souveraine!); sur les banlieues et les immigrés (dont B. "salue" la force anthropologique de "mépris" agressif, comparable à celles des "aborigènes"!); sur la mondialisation et la guerre - et, enfin sur le fait que le réel, dit Baudrillard, est "viral et métaleptique"…

Je n'avais pas compris ces notions, que B. a produit sur la fin, après 2001: là, c'est clairement expliqué.
"Métaleptique", c'est qu'il serait utile de piger que beaucoup de ce qu'on désigne comme un "effet" est en fait surtout une "cause". (!) (on peut discuter de ça).
Et "viral", parce que les analyses fausses, "simulacres" d'explication, ont tendance à se diffuser dans des domaines annexes mais hétérogènes du social, pour contaminer, hybrider, et parasiter tous les discours - et les rendre maladifs.

Applicable à tout (puisque c'est "viral") ce qui nous fait devenir chèvre: tant le débat social ou autour des retraites, qu'à la question des données informatiques ou des querelles médicales, à l'identitarisme qu'au mouvement "metoo", etc…

A tout, en fait, de ce qui fait notre occident "post-moderne", moins faux que faussé, moins en proie à l'"anomie" (certains ne respectent pas les lois) qu'à l'"anomalie" (certains ne veulent plus jouer selon les mêmes règles, ou ne le peuvent, ou ne les comprennent même pas!) - on n'en est pas vraiment sorti, et on en sortira seulement lors d'un "effondrement systémique", dont B. disait avec humour qu'il espérait le voir de son vivant.

Et qu'il était "optimiste, pas du tout "nihiliste" - ajoutant: "c'est le réel qui est nihiliste".

La seule "chose" (c'est le mot qu'il utilise pour désigner tous ces discours sociaux méta-évolutifs) qu'il n'aborde pas dans le bouquin d'entretiens, c'est l'écologie, l'environnement, etc… Là, dans les années 90-2000, il témoigne bien du fait que ça n'avait pas émergé. Maintenant oui, sur le mode "viral et métaleptique" (éoliennes subventionnées, antispécistes vegans, et Greta!)!


Ajoût encore (issu encore de réflexion nocturne, sur le matin, jeudi19 décembre 2019):

Les gens n'aiment pas bien savoir; ils préfèrent croire. Il faut dire que savoir, c'est d'abord savoir que l'on va mourir, ce qui n'est pas drôle, et qu'il n'y a que cela à savoir sur la mort. Plutôt que de savoir cet "être-pour-mourir", on va préférer croire qu'il y a quelque chose à savoir de plus ou à savoir dessus, autre que ce que l'on en sait déjà, c'est à dire rien de plus. C'est la croyance.

La croyance, pour reprendre Baudrillard, est sans doute "métaleptique", et elle se communique de façon "virale" - à la différence du savoir, qui est d'abord le savoir qu'il y a croyance. On pourrait dire que la croyance s'ignore comme telle, et qu'elle prend "l'effet pour la cause", entrant ensuite dans un système de propagation-répétition: on ne croit jamais que ce que quelqu'un d'autre croit. Aussi difficile de trouver l'origine d'une croyance donnée que d'une blague - or, il s'agit bien de cela: une blague sérieuse. Tout comme les blagues deviennent peu intelligibles sorties de leur contexte historico-social, de même les croyances: c'est un peu à cela aussi qu'on peut les reconnaître, au fait qu'elles s'inscrivent trop bien dans un horizon de discours finalement convenu. La croyance est secrétée, comme effet de langage, qui entend désigner des effets qui auraient des causes, qui sont en fait des causes, qui ont des effets de croyance  - il ne s'agit donc pas de causalité linéaire (Descartes, Humes, Nietzsche mettent en garde contre cette croyance).

Exemple trivial: les jeunes actrices sont agressées (effet) par des producteurs libidineux (causes). Mais sans jeunes actrices agressables, il n'y a aurait pas de producteurs libidineux! Juleitte Binoche, à la radio, entretien avec Laure Adler, étonemment claire sur cette question, fait état d'un savoir (d'actrice), et ne propage pas la croyance, qui supposerait, toujours, de jeter le bébé avec l'eau du bain. Autre exemple: les femmes se font agresser (effet) parce qu'elles sont impudiques (cause). mais c'est parce qu'elles sont agressées qu'elles sont jugées impudiques! C'est le même raisonnement: inverser la logique des croyances, dont l'une semble peut-être plus recevable que l'autre, mais qui toutes deux un simple produit occultant un savoir qu'on ne veut pas savoir.

C'est là qu'on peut passer de Baudrillard à Lacan (B. disait avoir bien aimé Lacan, qui veneiat non compléter mais détruire le psychanalyse, "ce dont elle avait bien besoin"!). En fait, le savoir, on le sait. C'est même pour cela qu'on ne veut pas le savoir - et qu'on construit le paravent des croyances. Lacan (via Zizek) signale que le propre même du réel étant d'être inhabitable, et le savoir donc insoutenable, la croyance vient le rendre vivable - puisqu'il est à peine pensable, du fait dêtre une butée de notre savoir. On sait tout sur le réel, et c'est qu'on ne sait pas ce qu'il y aurait de plus que ce que l'on sait. Ainsi, sur la mort. La croyance, c'est enfin et surtout ce que je veux croire, et que je crois surtout parce que les autres y croient. Ou semblent y croire. En fait, personne ne croit "vraiment" à ce qu'il croit: tout le monde "sait" - et sait bien que les croyances ne sont que jeu de fumées. Je sais que je ne sais pas - mais c'est effrayant, alors je vais croire, mais en sachant que mes croyances ne sont que des croyances. Et en croyant que je le dissimule assez pour entrer dans le groupe. Car croire seul, c'est être isolé, fou.

Certaines religions disent cela assez clairement - elles ont un savoir sur la croyance. Mais souvent, ce qui va fonder ma croyance va juste être le mimétisme, un effet d'entraînement un peu forcé: je vais croire ce qui, chez autrui, va me persuader de croire: à savoir sa croyance, que je me travestis comme un savoir. L'autre comme "sujet-supposé-savoir", infiniment rassurant, et angoissant, au regard de mon évidente absence de conviction fondée. Une croyance sur la croyance, celle que le croyance serait savoir. Comme chacun à foncièrement l'impression d'être le seul à ne pas croire, c'est à dire à être exposé à la vérité - insoutenable - la fuite se fera dans l'illusion que la croyance de l'autre soit un savoir. Je vais emboiter le pas, ou surenchérir, à hauteur non de mon doute, mais de la certitude (savoir) de la viduité de ma croyance. Mais que l'autre croient "vraiment", à ma place, et je suis sauvé - parce que je suis caché: je n'ai plus qu'à faire croire que je crois! Le Pape me dispense de croire, mais fait de moi un catholique - tant que je ne considère pas "vraiment" le Pape comme quel qu'un qui ne croit… pas plus que moi. C'est à dire comme quelqu'un qui sait, comme tout homme, non ce que le système dit croire, mais ce qu'il y a à savoir - c'est à dire rien de plus que cela.

Resterait à décrire le système de production des croyances à l'échelle des individus (et comment croire à ses croyances, c'est sans doute être illusionnée, mais illusionniste - dont abusé/désabusé) et l'éthique personnelle vis à vis de ses propres croyances, c'est à dire de celles auxquelles on veut croire…

samedi 9 novembre 2019

La fenêtre d'Overton, aussi connue comme la fenêtre de discours, est une allégorie qui désigne l'ensemble des idées, opinions ou pratiques considérées comme acceptables dans l'opinion publique d'une société. Ce terme est un dérivé du nom de son concepteur, Joseph P. Overton (1960-2003)[1], un ancien vice-président de la Mackinac Center for Public Policy (en)[2] qui, dans la description de sa fenêtre, a affirmé l'idée que la viabilité politique d'une idée dépend principalement du fait qu'elle se situe dans la fenêtre, plutôt que des préférences individuelles des politiciens[3].
Selon la description d'Overton, sa fenêtre comprend une gamme de politiques considérées comme politiquement acceptables au regard de l'opinion publique existante, et qu'un politicien peut donc proposer sans être considéré comme trop extrême, pour gagner ou conserver une fonction publique.
Après la mort d'Overton, d'autres ont examiné le concept d'ajustement de cette fenêtre d'idées acceptables, par la promotion délibérée d'idées en dehors de cette fenêtre (ou d'idées situées à la « frange externe ») avec l'intention de rendre acceptables, par comparaison, des idées jusqu'alors considérées comme marginales[4]. La technique de persuasion « porte-au-nez » est similaire.
Les médias, en tant qu'acteurs influents de l'opinion publique, sont susceptibles d'être un outil de la modification de cette fenêtre.[5] Les médias polémistes sont en particulier passibles de contribuer à l'étape 1 d'une telle opération.

Overton décrit une carte des idées du « plus libre » au « moins libre » concernant l'action du gouvernement, représentée sur un axe vertical. Comme la fenêtre change de taille ou se déplace, une idée à un endroit donné peut devenir plus ou moins politiquement acceptable. Les degrés d'acceptation[6] des idées publiques sont à peu près comme suit :
Fenêtre d'Overton
  • Impensable
  • Radical
  • Acceptable
  • Raisonnable
  • Populaire
  • Politique
La fenêtre d'Overton est une approche permettant d'identifier les idées définissant le domaine d'acceptabilité des politiques gouvernementales possibles dans le cadre d'une démocratie. Les partisans de politiques en dehors de la fenêtre d'Overton cherchent à persuader ou éduquer l'opinion publique afin de déplacer et/ou d'élargir la fenêtre.
Les partisans dans la fenêtre — soutenant les politiques actuelles, ou similaires — cherchent à convaincre l'opinion publique que les politiques situées en dehors de la fenêtre doivent être considérées comme inacceptables.
 
 
On reprend assez souvent l'exemple du cannibalisme qui a été popularisé par le réalisateur russe Nikita Mikhalkov pour illustrer le fonctionnement de la fenêtre d'Overton[réf. nécessaire].

Étape 1 : De l'impensable au radicalModifier

Dans la première étape, la pratique du cannibalisme est considérée comme immorale et répréhensible au sein de la société étudiée. Les sociétés occidentales actuelles se trouvent dans ce cas. À ce moment, le cannibalisme se trouve au niveau de tolérance le plus bas de la fenêtre d'Overton : impensable.
Pour faire changer la position de l'opinion publique, on commence par tranformer le sujet en question scientifique. Des savants renommés en parlent, des petites conférences et des colloques sont organisés autour du cannibalisme. Puisque la science (exacte ou non) ne doit pas avoir de limites d'investigation, le sujet cesse alors d'être un tabou absolu. Il n'est plus impensable, et un petit groupe d'« extrémistes » pro-cannibalisme se crée et fait des percées dans les médias. Cette opinion est alors perçue comme simplement radicale[7],[8],[9],[10].

Étape 2 : Du radical à l'acceptableModifier

Dans cette étape c'est l'acceptation qui est recherchée. Avec les conclusions scientifiques, ceux qui s'opposent de manière inflexible à l'ouverture sont traités en intransigeants, fanatiques opposés à la science. Un jargon pseudo-scientifique pourra être créé. Dans le cas du cannibalisme on préferera parler d'anthropophilie (ou d'antropophagie). Les connotations négatives associées au mot cannibalisme seront alors adoucies[7],[8],[9],[10]. Même si l'idée n'est pas encore largement acceptée, elle intègre progressivement le débat public.

Étape 3 : De l'acceptable au raisonnableModifier

Il s'agit ici de transformer le jugement de principe porté sur le cannibalisme. D'une chose en principe inacceptable on doit passer à une pratique "raisonnable". La consommation de chair humaine trouve une justification; par exemple, dans le cas d'une famine, un tel comportement semble devoir se légitimer par le principe fondamental de conservation. L'homme recherche sa propre conservation, et dans un cas extrême il doit pouvoir se nourrir de tout. L'application d'un tel raisonnement au cas général se fait d'autant plus facilement que le concept était considéré au départ comme impensable, et donc n'était pas en butte à aucun des contre-arguments usuellement produits lors de l'émergence d'un débat intellectuel.
D'un autre côté, les "anthropophiles" se targuent d'être pro-choix, défenseurs d'une liberté somme toute fondamentale. Les irréductibles de l'idée sont, quant à eux, perpétuellement critiqués pour leur position devenue radicale. Enfin, au besoin, la communauté scientifique conjointement aux médias saura fournir les preuves du fait que l'histoire est truffée d'exemples d'anthropophilie, et que les sociétés primitives n'avaient pas de problème avec[7],[8],[9],[10].

Étape 4 : Du raisonnable au populaireModifier

Il s'agit d'intégrer la pratique défendue à la mentalité populaire. Cela passe par les canaux de diffusion culturelle comme les films, les romans, les journaux ou même la musique. Dans le cas de l'anthropophilie, les films de zombies peuvent recouvrir une toute nouvelle signification par exemple. On pourra noter l'utilisation de célébrités ou de figures historiques décrites comme franchement cannibales[7],[8],[9],[10].

Étape 5 : Du populaire au politiqueModifier

Une fois ancrés dans la société civile, les groupes de pression cherchent une représentation politique, au travers de partis par exemple, et demandent une représentation légale. Dans le cas du cannibalisme, il serait ainsi question de légalisation. Ici, la possibilité de création d'un nouveau marché de consommation de chair humaine directe ou par produits dérivé pourrait renforcer la position des courants anthropophages avec le concours de l'industrie agro-alimentaire.
Les étapes présentées ci-dessus forment un exemple de la méthode de déplacement radical de la fenêtre d'Overton d'une position de l'opinion publique à son contraire. Cependant, chacune des étapes, prises individuellement, constitue en soit une ouverture non négligeable de la fenêtre. De plus, la fenêtre d'Overton peut être utilisée pour favoriser des idées impopulaires en introduisant dans le débat des concepts bien plus radicaux qui font pâlir l'impopularité de ceux que l'on défend en réalité[11].
 
 
Une idée semblable à la fenêtre d'Overton a été exprimée par Anthony Trollope en 1868 dans son roman Phinéas Finn (en) :
« Beaucoup de ceux qui, auparavant, considéraient la législation sur le sujet comme invraisemblable, la verront désormais simplement comme dangereuse, voire juste difficile. Et ainsi, avec le temps, elle en viendra à être considérée comme une possibilité, puis comme quelque chose de probable, et enfin elle deviendra l'une des quelques mesures dont le pays a absolument besoin. C'est de cette manière que se forge l'opinion publique. »
« Ce n'est pas une perte de temps », dit Phinéas, « d'avoir franchi la première grande étape dans sa réalisation ». « La première grande étape a été franchie il y a longtemps », déclara M. Monk « par des hommes qui étaient considérés comme des démagogues révolutionnaires, presque comme des traîtres, parce qu'ils l'ont fait. Mais c'est une bonne chose de franchir toute étape nous permettant d'aller de l'avant. »
Dans son discours West India Emancipation à Canandaigua, New York, en 1857[12], le chef abolitionniste Frederick Douglass a décrit comment l'opinion publique limite la capacité des personnes au pouvoir d'agir en toute impunité :
« Trouvez simplement ce qu'un peuple est prêt à subir en silence, cela vous donnera la mesure exacte de l'injustice et du mal qui lui seront imposés, et cela continuera jusqu'à ce que se manifeste une résistance par les mots ou la violence, ou les deux. Les limites des tyrans sont fixées par l'endurance de ceux qu'ils oppressent. »
L'idée est très similaire à une théorie antérieure qui allait être connue sous le nom de « sphère de Hallin ». Dans son livre de 1986 The Uncensored War[13], le chercheur en communication Daniel C. Hallin pose trois domaines de couverture médiatique dans lesquelles un sujet peut tomber. Les domaines sont schématisés par des cercles concentriques appelés sphères. Du centre jusqu'au cercle extérieur, il y a la Sphère du Consensus, la Sphère de la Controverse Légitime, et la Sphère de Déviance. Les propositions et avis peuvent être placés plus ou moins loin du centre métaphorique, et les acteurs politiques peuvent lutter afin de faire bouger ces positions.
La théorie de Hallin est développée et appliquée principalement comme une théorie explicative des différents niveaux d'objectivité dans la couverture médiatique mais il tient également compte du tiraillement permanent entre les médias et les acteurs politiques à propos de ce qui est considéré comme un désaccord légitime, ce qui — potentiellement — modifierait les frontières entre les sphères.
Comme l'une des études appliquant la théorie de Hallin l'explique : « les frontières entre les trois sphères sont dynamiques, en fonction du climat politique et de la ligne éditoriale des différents médias »[14]. Vue ainsi, l'idée inclut également le bras de fer concernant les frontières entre le discours politique normal et le discours déviant.

dimanche 13 octobre 2019

Je l'ignorais, mais l'anglais britannique a plus évolué que l'anglais américain. Les pèlerins du Mayflower avaient un accent assez proche de l'américain anglo-saxon de maintenant, tandis que l'anglais oxfordien upperclass a attendu pour s'imposer que l'éducation se généralise en G-B.

lundi 30 septembre 2019

Nanarland: "Qu’est-ce que vous voulez qu’on vous dise ? Quand on croit qu’on a tout vu, on s’expose encore à être laissé pantelant par l’inexprimable indicible : on en reste aussi estomaqué qu’un héros lovecraftien foudroyé par sa rencontre avec les Grands Anciens. Metteur en scène échappé de l’asile, scénariste lobotomisé, acteurs en roue libre, effets spéciaux au-dessous de zéro : ni fait ni à faire, comme un torchon cochonné par le dernier des cancres d’une mauvaise école de cinéma, « Internationel Guerillas » défie le vocabulaire tout en poussant encore plus loin le grotesque de son discours. Moins fou formellement que des films d’action pure comme « Badmash Te Qanoon » ou « Haseena Atom Bomb », cette chose purement impensable n’en constitue pas moins, du fait même d’un propos aussi stupéfiant que premier degré, l’un des points les plus aigus de la démence du cinéma pakistanais."

vendredi 19 avril 2019

Je n'étais jamais entré dans la détail de la colonne Trajane, et avais même oublié qu'il s'agissait de la mise en bas-relfes des guerres contre les Daces. Comme je viens de socler une armée dace, et une roamaine, je redécouvre ceci:

La colonne Trajane, haute de 100 pieds, fut élevée par le Sénat et le peuple romain en l'honneur de l'empereur «afin de marquer la hauteur de la montagne qu'on a déblayée pour construire de si magnifiques monuments». (Corp. inscr. lat., t. V1, n° 960). La colonne, surmontée d'une statue de l'empereur, était surtout destinée à célébrer les victoires de Trajan sur les Daces ; la base est une chambre sépulcrale qui lui servit de tombeau. L'architecte du forum de Trajan, Apollodore de Damas, fut sans doute aussi celui de la colonne.

Respectée au moyen âge, sauf le caveau funéraire et la statue de bronze qui la couronnait, la colonne Trajane fut beaucoup étudiée à l'époque de la Renaissance, en particulier par Raphaël et ses élèves ; Sixte-Quint en fit déblayer les abords et placa sur le sommet une statue de saint Pierre, pendant de la statue de saint Paul qui surmonta la colonne de Marc-Aurèle.

Moulée en partie par ordre de François Ier (1541), puis par ordre de Louis XIV (1665), la colonne le fut de nouveau sous Napoléon III (1861), qui fit ensuite reproduire les moulages par la galvanoplastie (1861) ; ces plaques, aujourd'hui au musée de Saint-Germain, ont été surmoulées pour le musée de Kensington (1876).


https://mediterranees.net/civilisation/armee_romaine/colonne_trajane/dacique_1.html

La première guerre dacique

Première campagne

La scène est sur les bords du Danube, gardés par des sentinelles romaines. On voit des tourelles fortifiées, des approvisionnements de bois et de fourrage, des barques chargées de tonneaux.
Le dieu Danube, près de Viminacium (Kostolatz), favorise le passage des Romains qui, précédés de Trajan, franchissent le fleuve sur deux ponts de bateaux (avril 101). A peine débarqué, l'empereur tient un conseil de guerre ; il est assis sur un suggestus formant tribune.
Trajan offre le premier sacrifice de lustratio (entrée en campagne), puis, debout sur un suggestus avec deux lieutenants, donne l'ordre de lever le camp. Au milieu du bruit, un esclave, portant un égouttoir ou un crible, est renversé par son mulet (incident d'ailleurs inconnu). L'empereur harangue ses troupes, fait construire un camp retranché par les légionnaires et surveille lui-même leurs travaux.
Un pont relie cette première forteresse à une seconde, qui est en cours de construction ; plus loin, un retranchement circulaire. Trois éclaireurs paraissent sur un autre pont, jeté sur une petite rivière où un soldat puise de l'eau. Les légionnaires abattent des arbres et Trajan surveille la construction d'une nouvelle forteresse.
On amène devant l'empereur un espion dace. Les Romains jettent un pont sur une rivière et construisent un poste fortifié. L'empereur envoie de la cavalerie en reconnaissance.
L'armée avance à travers un paysage boisé en abattant des arbres. Une première bataille, (celle de Tapae, Dion, 68, 8) s'engage contre la cavalerie dace ; les Romains ont des auxiliaires germains (le haut du corps nu). Des soldats apportent des têtes coupées à Trajan. Le combat a lieu pendant un orage, indiqué par la présence de Jupiter fulminant, qui lance la foudre contre les Daces. Ceux-ci recueillent leurs blessés.
L'empereur fait mettre le feu aux retranchements des Daces, où l'on aperçoit une rangée de têtes décharnées et un étendard à l'emblème du serpent. Les Romains poursuivent les Daces au-delà d'une rivière. Deux ambassades daces se présentent à Trajan. Les Romains pressent vivement l'ennemi, mettent le feu aux maisons et trouvent les bestiaux des ennemis égorgés. Des femmes daces avec leurs enfants sont prisonnières des Romains et semblent faire cortège à Trajan prêt à se rembarquer. Les cavaliers daces attaquent un poste romain en traversant la glace d'une rivière ; mais la croûte cède et ils sont noyés.
Après la noyade des Daces, un autre poste romain subit une attaque de l'infanterie ennemie, que secondent des cavaliers sarmates cuirassés d'écailles ; les Daces essaient de détruire les murs avec le bélier. Ici se termine la première campagne (102 après JC).

Deuxième campagne

L'armée romaine, dans une ville sur le Danube (Pons Trajani), se prépare à une nouvelle expédition. Des bateaux embarquent des approvisionnements et des chevaux.
L'empereur s'embarque et débarque à son tour, harangue ses troupes et charge à la tête de la cavalerie. Deux éclaireurs romains viennent à sa rencontre. La mêlée s'engage contre les cataphractaires ou cuirassés sarmates, alliés de Décébale. Le combat dure jusqu'au milieu des ténèbres ; le buste de la Nuit paraît au-dessus des rochers.
Un chef dace se tue pour échapper à l'esclavage ; les Romains reçoivent la soumission de vieillards, de femmes et d'enfants. Ils s'occupent, sous les yeux de l'empereur, à élever un retranchement. On garrotte les prisonniers daces et les Romains donnent des soins à leurs blessés. L'armée se remet en marche sous les yeux de l'empereur, auquel on amène un espion dace, et une nouvelle bataille s'engage.
Les Daces sont mis en fuite. Trajan harangue ses troupes et leur distribue des récompenses. Des prisonniers daces sont gardés dans un retranchement. Plus loin, l'empereur assis reçoit les hommages de ses soldats, tandis qu'à l'intérieur d'une bourgade dace, trois prisonniers romains sont torturés par des femmes qui les brûlent avec des brandons. Trajan, revenu sur la rive du Danube, y reçoit la soumission de deux chefs barbares. Ainsi se termine la deuxième campagne.

Troisième campagne

L'armée repasse le Danube sur un pont de bateaux et occupe un fort abandonné par les Daces. Devant une place puissamment fortifiée, Trajan reçoit des ambassadeurs daces qui viennent demander la paix. On abat des arbres pour construire un retranchement.
Trajan offre un sacrifice et harangue ses troupes ; l'armée avance à travers un pays boisé, en abattant des arbres. On voit les têtes de deux Romains plantées sur des pieux en avant de deux fortins. Trajan, à cheval, franchit une rivière sur un pont.
La rivière passée, Trajan fait mettre le feu aux retranchements ennemis. Les Daces battent en retraite ; les Romains construisent un camp fortifié et un chef dace vient faire sa soumission. L'armée avance, avec une file de chariots ; on aperçoit de nombreux fortins à l'horizon.
Sous les yeux de Trajan, la cavalerie numide prend le galop ; les Daces sont mis en fuite et gagnent la forêt. Les Romains construisent un retranchement ; au premier plan, on voit une catapulte sur un chariot traîné par deux mules. Trajan reçoit deux princes daces.
Une nouvelle bataille s'engage dans la forêt, en avant de grandes piles de bois. Les Daces abattent des arbres pour se retrancher. Les Romains, munis d'une baliste, avancent et construisent un retranchement. Trajan reçoit un prisonnier dace.
Les Daces sont refoulés dans leurs retranchements, que les Romains emportent d'assaut en formant la tortue avec leurs boucliers. On apporte à Trajan les têtes de deux chefs daces.
Nouvelle défaite des Daces. Trajan surveille la construction de retranchements; on élève une nouvelle forteresse auprès d'une source.
Trajan reçoit la soumission de Décébale, qui vient demander la paix en compagnie de chefs daces. Les Daces détruisent ex-mêmes les fortifications de leur capitale (Sarmizegetusa, Varhély) Des vieillards, des femmes et des enfants rentrent dans le pays d'où ils ont été chassés par la guerre. Trajan harangue ses troupes victorieuses.
Entre deux trophées, la Victoire inscrit sur un bouclier les victoires des Romains. Fin de la première guerre dacique.

La seconde guerre dacique

Quatrième campagne

Au printemps de 105, les troupes romaines s'embarquent à Ancône sur l'Adriatique et abordent dans une ville importante où Trajan est reçu avec des démonstrations de fidélité.
Trajan offre un sacrifice solennel, au milieu d'une grande multitude de peuple. L'identité des villes où se passent cette scène et la suivante est encore sujette à discussion.
L'empereur offre un sacrifice dans une autre ville magnifique où il vient de débarquer avec ses troupes ; puis il aborde de nouveau (sur la côte dalmate ?) et prend la tête de sa cavalerie.
Des paysans daces viennent au devant de l'empereur et implorent sa protection. Trajan offre un grand sacrifice sur un autel voisin de cinq autres ; au second plan, quatre sacrificateurs retiennent des taureaux. A l'entour se pressent les familles des Daces fidèles. La guerre commence. On abat des arbres pour construire des retranchements. Les Daces se fortifient derrière une triple enceinte.
Une forteresse romaine est attaquée par les Daces, qui sont défaits et se réfugient dans leurs retranchements. Une nouvelle attaque met les Romains en péril.
Trajan, à la tête de sa cavalerie, vient en aide aux Romains. Vainqueur, il offre un sacrifice. Les Romains ont construit un pont colossal avec des piles en maçonnerie sur le Danube, entre Turnu-Severin et Kladova. Auprès d'une ville romaine (Pontes Trajani), où l'on remarque un amphithéâtre, Trajan reçoit la soumission de chefs indigènes (Germains, Daces et Jazyges ?)

Cinquième campagne

L'armée traverse le fleuve et atteint une ville fortifiée, où l'on offre un sacrifice en l'honneur de Trajan. L'empereur officie lui-même dans une lustratio solennelle, puis il harangue ses troupes.
Trajan préside un conseil de guerre et donne l'ordre de marche. On voit des chariots portant les boucliers des soldats. Les Romains s'avancent sur deux colonnes à travers un terrain escarpé ; ils font halte à un poste fortifié.
Les soldats romains vont récolter la moisson et surveillent les mulets. Sur le sommet d'un rocher s'élève une forteresse dace, où l'on aperçoit cinq chefs qui semblent tenir conseil et se livrer à une discussion violente.
Une mêlée s'engage. Les Romains, vainqueurs, fortifient leur camp. Ils attaquent la principale forteresse du roi dace, Sarmizegetusa, et essaient de l'escalader avec des échelles, sous une pluie de pierres et de traits. L'empereur tient conseil.
Le rocher occupé par les Daces est couvert de machines de guerre à trois roues. L'attaque porte sur un autre point et s'appuie sur un retranchement construit avec des arbres abattus.
Trajan reçoit une ambassade qui vient demander la paix. Les Daces mettent le feu à leur capitale pour ne pas la livrer aux Romains. Un vieillard quitte sa maison en pleurant ; un jeune homme tombe entre les bras de ses amis. Réunis autour d'un chaudron qui contient un breuvage empoisonné, les chefs daces en remplissent leurs coupes et se donnent la mort.
Les autres Daces s'enfuient épouvantés et viennent faire leur soumission à Trajan. L'empereur distribue des provisions de blé aux légionnaires, qui les emportent dans des sacs. Il harangue ses troupes au milieu d'acclamations qui le saluent du titre d'imperator. Les Romains occupent de nouveau Sarmizegetusa.
Les Romains construisent un fort circulaire. Trois chefs daces viennent implorer la clémence de Trajan. Les Romains traversent une rivière ou un marais sur un pont.
De l'autre côté de la rivière, les Daces, à l'approche des Romains, abandonnent une forteresse devant laquelle sont accumulées des quantités de bois et attaquent un poste romain. Une terrible mêlée s'engage sous les yeux de Décébale. Mais les Romains l'emportent. Vaincus et découragés, les Daces battent en retraite.
Trajan harangue ses légionnaires ; trois soldats du train conduisent des mulets chargés de vases d'argent. Ce sont les trésors de Décébale, ensevelis par ses ordres dans le lit de la rivière Sargetia et découverts grâce au témoignage d'un prisonnier (Dion, 68, 14). les Romains poursuivent Décébale et les princes daces, dont l'un se tue et l'autre tue son compagnon. Quelques fidèles restent autour du roi, tandis que d'autres Daces acclament Trajan.
La cavalerie romaine poursuit Décébale et ses compagnons dans les montagnes ; le sol est jonché de cadavres. Décébale, tombé de cheval au pied d'un arbre, serré de près par des cavaliers romains, se donne la mort. Des fantassins romains garrottent des prisonniers daces.
Les enfants de Décébale sont conduits en captivité ; la tête du roi est apportée au camp romain. L'infanterie continue à faire des prisonniers. Au fond, des animaux divers (boeuf sauvage, élan, sanglier) indiquent la nature farouche du pays. La dernière forteresse dace est prise ; le buste de la Nuit paraît au-dessus de l'horizon. La lutte continue sur la droite près d'une ville où les Daces ont trouvé des auxiliaires (vêtus et coiffés autrement qu'eux).
Les Romains mettent le feu à cette ville, dernier asile des vaincus. Les Daces abandonnent, avec leurs troupeaux, les forteresses occupées par les Romains ; vieillards, femmes et enfants prennent tristement le chemin de l'exil (107 après JC).
       

vendredi 12 avril 2019

Une sarisse macédonienne (5m80) pesait environ 5 kilos.

lundi 4 mars 2019

Commentaires relevés sur le net:

Sur la ligue du LOL et V. Glad en particulier: Un faux gaucho victime de la "dissociation cognitive" intrinsèque à sa position. Pour écrire à "Libé", il faut manier la néo-langue de bois indigno-féministo-indigéniste qui tient lieu de pensée d'extrême-gauche. Or, comme jadis du jargon maxiste-léniniste ou du catéchisme, une bonne part de ceux-là même qui se trouvent à le relayer savent que c'est un paquet d'âneries!… Mais faut garder la face, & son poste … Donc on se défoule en privé - curé au bordel, coco en datcha de luxe, ou sur internet…


Sur un accident de scooter à Grenoble:



Sur un livre récent:

Ce n'est pas si compliqué: car on a désormais 5 parts quasi égales, faites chacune de 20% de population de la France métropolitaine.

20% les "gagnants": CSP+ ou à défaut boulot valorisant, bobo-techno, centre-villes métropoles Nantes-Paris-Lyon, Macron (& Nuit Debout pour rigoler), mariage-pour-tous, pro-migrants mais pas trop quand même et quittant le quartier si "vivant" pour assurer le bon collège des gamins, polyglottes et culturés, écolo-soucieux donc fatalement contradictoires (voyages en avion pour boulot ou loisir!), "devenus assez nombreux pour vivre de façon autonome et croire que tout le monde vit comme eux" - informés, mais/donc en panique: "comment sauver la planète???" + "comment "les" intégrer???" Silence de mort… Bref, moi.

20% de "vieux cons", les sortants: des retraités, encore avec des sous, mais virant (justement) paranoïdes, car ponctionnés comme des ânes, & surtout complètement largués, par la société de l'informatique, des tatouages et des gays qui se clonent: raisonnent encore comme en 1992 ou comme en 1962, Fillon-Wauqiez-De Gaulle-Jésus reviens!, tradi-cathos (plus que 9%!) ne se remettant pas d'être devenus deux fois moins nombreux que les arabes; tout ce qu'ils croient comprendre du XXIè siécle tient dans une matinale de BFM avec Dupont-Aignan, tout est faux - sauf la peur, fondée; pas écolos pour deux sous, donc en voie de disparition totale. Bref mes beaux-parents.

20% de "gueux": déjà, c'est personne que je connais… mais on devine sans peine, en passant en grosse berline hybride, une indescriptible faillite provinciale - la "France périphérique" de Jonhnathan et Jennyffer, "Gilets Jaunes" hagards des pavillons pas-aux-normes climatiques, des zones commerciales nazes et coins déshérités en forme de rond où remâcher son malheur diesel, employées piercées ou chômeurs sans dents, complètement à la masse, conspirationnistes rouquins oscillant entre Mélenchon ou Le Pen ou rien, antisémites par défaut & pro-Poutine par Boulangisme - se rendant bien compte qu'"on" (l'élite!) a "voulu" leur faire de force fréquenter des arabes, et que ce n'est pas une marque de respect… Voudraient, depuis peu, qu'on les appelle "le peuple", mais ont bien pigé que, pour les journaleux, qu'ils adorent (quand ils arrivent à les lire), les "quartiers populaires", c'est plutôt… (ci-dessous)

20% "oumma": donc une population, une religion, et un ordre politique; en gros 20%, donc 5% ici, 90% là; micro-ou macro-campements sarrazins importés à la lisière/taille de villes entières, alimentés par croissance endogène et exotruc (70% de l'immigration légale est musulmane, dont 80% en regroupement familial, plus les illégaux = + la ville de Grenoble chaque année); salafisés à 50%, "veulent manger halal" à 80%, antieuh-sionistes à 100%, histoire & culture française quoi? (à peu près rien de ce qu'on peut proposer ne leur étant de fait recevable), chaînes satellitaires et voiles: c'est bon comme là-bas dis! Votent comme un seul prophète pour le candidat le plus pro-visas. Vase clos de faux mariages "mixtes" du bled avec klaxons à Toulon. De 3% en 1968, à 18% en 2015, "assez nombreux désormais pour être culturellement autonomes"… Certes! Cependant, des signes d'"insertion" culturelle (le rap, la prison) et économique (le cannabis, "3ème employeur français") - en attendant le "Vénézuéla algérien" & ses 10-15 millions d'émigrés…

enfin, le "ramassis", un 20% indistinct, fait de particularismes inclassables, souvent clos sur aux-mêmes également, parfois en partance : juifs (1% - pour le moment, car à 1 contre 20, ils vont en chier); corses; noirs mais témoins-de-Jéhovah ou vaudou (4%), asiatiques (5% - tiens, qu'est-ce qu'ils foutent là les chinois?), Dheepan, & ses frères; marginaux, cancéreux, handicapés & fous, EPHAD (bientôt 1 million de centenaires!); gitans, nomades & autres zadistes; sectes & moines, travestis & travailleurs du sexe, aaaaaaartistes (de moins en moins concernés, tiens, on les entend bien se taire, les ex-starlettes à poil & les mecs bourrus mais sensibles, z'ont plus rien à dire depuis "Welcome"?…); enfin les expats, les "plus-là", qui ont cru de 228% en nombre en quelques années.


Ceci formant la métropole. Un descriptif des Antilles, Guyane, Réunion, Mayotte étant à faire - et là on a toute la France!
Emission FC Laurentin du 04/03/19: 

Schisme, hérésie, secte : comment qualifier la dissidence religieuse ?

 Aujourd'hui, on emploie le mot « sectes » plutôt que celui d’« hérésies » : ces dernières semblent reléguées aux temps lointains quand les « sectes » seraient contemporaines. Jean-Pierre Chantin montre à quel point une telle grille de lecture est pourtant erronée.

Qu'ai-je appris? Eh bien que les jansénistes ne se désignaient pas comme tels - puisque de leur point de vue ils étaient juste détenteurs de la "vraie religion" - mais comme "Portroyalistes". De même l''Eglise ne les a jamais stigmatisés comme hérétiques, relevant simplement des "erreurs" dans les thèses de Jansénius intéreprètant St Augustin.

St François d'Assise a failli être désigné comme hérétique.

Le partage entre églises protestantes et mouvements autres (Jéhovah, Mormons…) c'est que ces derniers ont ajouté des textes sacrés.

dimanche 6 janvier 2019

Sur le plan de l'immobilier, en gros, c'est de plus en plus cher (sauf à Saint-Etienne) :

https://www.lemonde.fr/argent/article/2 ... 57007.html


Tout le monde n'approuve pas les analyses de Louis Chauvel - sociologue du "déclassement" des jeunes (et moins jeunes) - parce qu'il s'appuie surtout sur la valeur du patrimoine pour évaluer la richesse des foyers. Et le fait d'avoir un smartphone ne compense pas, au bout d'un temps, le fait de ne pas pouvoir se loger comme on voudrait.

http://www.slate.fr/story/126821/louis- ... graphiques

"Si la France reste une société de classes moyennes avec son coefficient de Gini, indicateur utilisé pour mesurer les inégalités, faible comparé à celui de ses voisins, la nouvelle donne patrimoniale bouleverse cette représentation d’une société bien tassée autour de la moyenne. Ce retour du rôle du patrimoine «dans la vraie vie des vraies gens» nous explique Chauvel, est la véritable clé du retour des inégalités, «en particulier pour les jeunes, parce que s’ils n’ont pas de patrimoine ils sont morts. Enfin, ça sera dur pour eux.»"

Or, "
Durant la décennie 2000, l’indice des prix de l’immobilier a quasiment doublé. Or cette donnée est la plupart du temps évacuée dans le calcul des inégalités en France. La prise en compte du patrimoine est le révélateur chez les classes moyennes d’«une distorsion croissante, préalable à un écartèlement, voire une rupture de continuité, entre les classes moyennes dotées d’un substantiel patrimoine net, sans remboursement de prêts, par opposition aux autres, propriétaires endettés ou locataires, dont les conditions économiques d’existence sont d’une tout autre nature.»"


Tous les schémas de ce long article sont très "marrants" - un peu caricaturaux, mais expressifs. J'aime bien "le strobiloïde, typique de la structure de l'aligot auvergnat", illustrant la distribution inégale revenus/patrimoine. Mais le dernier schéma gribouillé est vraiment lugubre - et me semble, dès 2016, annoncer les Gilets jaunes.

samedi 5 janvier 2019

J'ai été un Bloch. Actuellement, je ressens la douleur de penser comme un Swann. Avec inquiétude je perçois le moment où je sentirai le besoin d'être un Saint-Loup. Je dis cela en toute modestie, tant ce que dit Proust est chose simple, dans l'observation de soi.


(ajoût de déc. 2019: qualifié de Brichot sur un forum!

Un intervenant: "C'est très bien de nous apprendre l'origine de Var et de Gardon. Cela nous rappelle avec plaisir les fameuses étymologies de Brichot , professeur à la Sorbonne, connu aussi sous le surnom affectueux de Chochotte."

Un intervenant taquin:" SI VOUS VOULEZ FRIMER AVEC ROGOR (???!!!) , APPRENEZ LUI CE QU'IL NE SAIT PAS ENCORE UN DES SENS DU MOT VAR QUE TOUT SCRABBLEUR CONNAIT"

Une intervenante, souvent perfide mais pas idiote: "Je ne sais à quoi rime cette embardée étymologico-historico-géographique, au lieu d'aborder simplifiquement la question de ces inondations. Il aime peu mettre les pieds dans le plat sans circonlocution préparatoire, et parfois vous avez la circonlocution sans même les pieds dans le plat. J'y subodore quelque évitement psychologique à la suite de quelque très ancienne angoisse d'enfance.
Nous errons tous, mais chacun différemment..."


 "Il y avait, à ce dîner, en dehors des habitués, un professeur de la Sorbonne, Brichot, qui avait rencontré M. et Mme Verdurin aux eaux et, si ses fonctions universitaires et ses travaux d'érudition n'avaient pas rendu très rares ses moments de liberté, serait volontiers venu souvent chez eux. Car il avait cette curiosité, cette superstition de la vie, qui unie à un certain scepticisme relatif à l'objet de leurs études, donne dans n'importe quelle profession, à certains hommes intelligents, médecins qui ne croient pas à la médecine, professeurs de lycée qui ne croient pas au thème latin, la réputation d'esprits larges, brillants, et même supérieurs. Il affectait, chez Mme Verdurin, de chercher ses comparaisons dans ce qu'il y avait de plus actuel quand il parlait de philosophie et d'histoire, d'abord parce qu'il croyait qu'elles ne sont qu'une préparation à la vie et qu'il s'imaginait trouver en action dans le petit clan ce qu'il n'avait connu jusqu'ici que dans les livres, puis peut-être aussi parce que, s'étant vu inculquer autrefois, et ayant gardé à son insu, le respect de certains sujets, il croyait dépouiller l'universitaire en prenant avec eux des hardiesses qui, au contraire, ne lui paraissaient telles, que parce qu'il l'était resté. ...."

Moi, être un Brichot, ça ma va (poretto)!

Je trouve même que je monte en grade, car pendant longtemps je me suis, sincèrement, cru être… un Bloch. Bloch, c'est l'histoire de ma vie!

« Monsieur, je ne puis absolument vous dire s’il a plu. Je vis si résolument en dehors des contingences physiques que mes sens ne prennent pas la peine de me les notifier. »

Bloch était mal élevé, névropathe, snob et appartenant à une famille peu estimée supportait comme au fond des mers les incalculables pressions que faisaient peser sur lui les couches superposées des castes supérieures à la sienne, chacune accablant de son mépris celle qui lui était immédiatement inférieure.

Bloch avait complètement changé d’avis sur la guerre quelques jours après où il vint me voir affolé. Quoique « myope », il avait été reconnu bon pour le service.

Bloch avait cessé de « sortir », de fréquenter ses anciens milieux d’autrefois où il faisait piètre figure. En revanche, il n’avait cessé de publier de ces ouvrages dont je m’efforçais aujourd’hui, pour ne pas être entravé par elle, de détruire l’absurde sophistique, ouvrages sans originalité, mais qui donnaient aux jeunes gens et à beaucoup de femmes de monde l’impression d’une hauteur intellectuelle peu commune, d’une sorte de génie. :roll:


Heureusement, pas complètement un Bloch. Va donc pour Brichot!

"homme bavard et pédant, féru de plaisanteries et de jeux de mots souvent médiocres. Passionné d’étymologie, Brichot discourt savamment sur l’origine des noms de villages et a le mérite d’éveiller l’intérêt de ses interlocuteurs, dont le narrateur"

(Une robe) "blanche ? Blanche de Castille?", puis sans bouger la tête lança furtivement de droite et de gauche des regards incertains et souriants…… Swann ne put trouver les plaisanteries de Brichot que pédantesques, vulgaires et grasses à écœurer. Puis il était choqué, dans l’habitude qu’il avait des bonnes manières, par le ton rude et militaire qu’affectait, en s’adressant à chacun, l’universitaire cocardier.

"…un phénomène parallèle se produisait pour Brichot. Malgré la Sorbonne, malgré l’Institut, sa notoriété n’avait pas jusqu’à la guerre dépassé les limites du salon Verdurin. Mais quand il se mit à écrire presque quotidiennement des articles parés de ce faux brillant qu’on l’a vu si souvent dépenser sans compter pour les fidèles, riches d’autre part d’une érudition fort réelle, et qu’en vrai sorbonien il ne cherchait pas à dissimuler de quelques formes plaisantes qu’il l’entourât, le « grand monde » fut littéralement ébloui…" :)

Et je ne désespère pas de finir en vague Swann. Mon étude sur Ver Meer ne sera jamais finie, mais j'aurai eu… des compensations.






Tu deviendras celui que tu as rejeté.
Tu brûleras ce que tu as adoré.
Tu adoreras ce que tu as brûlé.
Tu finiras comme tu as commencé.


Que penser des analyses sur la culture d'Olivier Donnat, sinon que la culture, au sens où on a pu en attendre quelque chose de politique, sous peu ne va plus exister - ou plutôt que sa qualité unificatrice va laisser la place à des chapelles érudites, secrètes, maniques ou absurdes - n'est-ce pas déjà arrivé? La fin de la société…


Le Monde, 26/10/2018 (par Michel Guerrin (rédacteur en chef au « Monde »)

« La thèse du ruissellement, selon laquelle plus l’offre culturelle sera riche, plus elle sera partagée par tous est illusoire »

Les milliards investis dans les équipement de l’Etat ou l’offre numérique croissante n’y font rien : ce sont surtout les milieux aisés et cultivés qui en profitent.
Olivier Donnat est sociologue au ministère de la culture. Il est un loup dans la bergerie, l’ennemi de l’intérieur, le gars qui casse le moral, fait tomber les illusions. Et les deux études qu’il vient de publier, sur le livre et la musique, ne vont pas arranger sa réputation. Le problème est que ce qu’il écrit depuis trente ans est exact. Ce qu’il a prophétisé s’est vérifié. Ce qu’il annonce est inquiétant.
En spécialiste des pratiques culturelles, il a montré que les milliards investis par l’Etat pour construire musées, opéras, théâtres, salles de spectacle ou bibliothèques, n’ont servi qu’à un Français sur deux – aisé, diplômé, Parisien, issu d’un milieu cultivé. Ceux qui restent à la porte, souvent aux revenus modestes, s’en fichent ou pensent que cette culture axée sur les traditionnels « beaux-arts » est déconnectée de leurs envies.
« L’excellence conduit à privilégier des créations exigeantes auxquelles les personnes les plus éloignées de la culture ne sont pas préparées »
Ce constat, on le lit dans l’enquête sur les pratiques culturelles des Français que le ministère publie tous les dix ans. Olivier Donnat a piloté celles de 1989, 1997 et 2008. La prochaine est pour 2019, qui se fera sans lui – il part à la retraite dans deux mois.

Le fossé se creuse

Elle devrait être tout autant déprimante. Car ce qu’a montré notre sociologue, c’est que le fossé se creuse. La construction frénétique de musées ou de théâtres en trente ans a provoqué une forte augmentation de la fréquentation, mais ce sont les aficionados qui y vont plusieurs fois, tandis que les ouvriers et les jeunes de banlieue y vont moins.
C’est dur à entendre, car l’Etat culturel s’est construit sur l’illusoire thèse du ruissellement : plus l’offre culturelle sera riche, plus elle sera partagée par tous. Aussi le ministère et les créateurs ont longtemps nié cette étude. « Il y a eu des tensions, se souvient Olivier Donnat. J’ai été vu comme un rabat-joie, on me disait que j’avais tort. »
Aujourd’hui, cette dure réalité est acceptée puisque les cinq derniers ministres de la culture ont fait du combat pour la diversité des publics leur priorité. Mais Olivier Donnat a montré que dans les faits, rien n’a bougé. D’abord parce que ça se joue ailleurs, dans la cellule familiale, à l’école aussi – deux foyers d’inégalités. Mais un obstacle se trouve aussi au sein même du ministère de la culture, armé pour soutenir son offre prestigieuse, très peu pour capter un public modeste.

Contradiction

Olivier Donnat pointe aussi une contradiction. « Nos grands lieux culturels visent logiquement l’excellence. Sauf que l’excellence conduit à privilégier des créations exigeantes auxquelles les personnes les plus éloignées de la culture ne sont pas préparées. Parler à ces personnes est très compliqué. La Philharmonie de Paris y parvient en décloisonnant les genres musicaux. »
Prenons le contre-pied. La France se doit d’avoir les meilleurs musées, opéras ou théâtres, tant mieux pour ceux qui aiment, et tant pis pour les autres. On ne va pas fermer ces lieux qui contribuent au prestige de la nation et dopent le tourisme. Et puis sans ces équipements, la situation serait sans doute pire. Enfin, pourquoi vouloir qu’une pièce novatrice, un film expérimental et un art contemporain pointu plaisent à tous ?
Sauf que cette offre est financée avec de l’argent public et qu’au moment où les fractures sociales n’ont jamais été aussi fortes, une telle posture est jugée élitiste et a du mal à passer. Ajoutons qu’il existait, dans les années 1960 à 1980, un riche tissu culturel local (MJC, associations) qui, en trente ans, a été broyé sans que l’Etat bouge le petit doigt au motif qu’il n’est pas de son ressort, alors qu’en fait il le méprise. Ce réseau avait pourtant l’avantage d’offrir aux jeunes un premier contact avec la culture.
Pour Olivier Donnat, l’avenir s’annonce noir pour le théâtre classique ou contemporain, les films français d’auteurs ou la lecture de romans
En pot de départ, Olivier Donnat nous confie que le pire est à venir. Car les plus gros consommateurs de notre culture d’Etat sont les baby-boomers – ils ont du temps, de l’argent, lisent beaucoup, vont intensément au spectacle. Sauf qu’ils ont 60 ans et plus. « Dans dix ou vingt ans, ils ne seront plus là, et nos études montrent qu’ils ne seront pas remplacés », dit Olivier Donnat, qui annonce un avenir noir pour le théâtre classique ou contemporain, les films français d’auteurs ou la lecture de romans.
Le numérique, dont les jeunes sont familiers, peut-il favoriser la démocratisation culturelle ? Eh bien non, répond Olivier Donnat avec ses ultimes études sur « l’évolution de la diversité consommée » dans le livre et la musique (à télécharger sur le site du ministère de la culture ou sur cairn.info).

« Le numérique produit les mêmes effets »

L’offre en livres et en musiques a pourtant considérablement augmenté en vingt-cinq ans. Mais les ventes baissent. Et puis, qui en profite ? « Le numérique, porté par les algorithmes et les réseaux sociaux, ouvre le goût de ceux qui ont une appétence à la culture, mais ferme le goût des autres, qui, par exemple, ne regardent que des films blockbusters », explique Olivier Donnat, qui en conclut : « Le numérique produit les mêmes effets que les équipements proposés par l’Etat : ce sont les milieux aisés et cultivés qui en profitent. »
Olivier Donnat prolonge la déprime en décryptant les ventes de livres et de musiques. Tout en haut, les heureux élus sont moins nombreux et à la qualité incertaine – best-sellers pour les livres, compilations pour les CD. Tout en bas, et c’est récent, le sociologue constate une hausse phénoménale de livres et musiques pointus, vendus à moins de cent exemplaires ou à moins de dix exemplaires.
Et au milieu, il y a quoi ? Des paquets d’œuvres souvent de qualité, dont les ventes sont également en baisse, noyées dans la surproduction. Ces œuvres du « milieu » font penser aux films « du milieu », ainsi nommés quand ils étaient fragilisés, coincés entre les blockbusters et les films marginaux. Les œuvres du milieu, qui définissent une « qualité française », forment justement le cœur de cible du ministère de la culture. Elles seront demain les plus menacées. Déprimant, on vous dit.



Télérama (24/08/2015) :

L'amateur de littérature serait-il devenu une espèce menacée ? Tous les signes sont là. Son habitat se raréfie : à Paris, par exemple, 83 librairies ont disparu entre 2011 et 2014. Et sa population ne cesse de décliner. Selon une enquête Ipsos/Livres Hebdo de mars 2014, le nombre de lecteurs avait encore baissé de 5 % en trois ans. En 2014, trois Français sur dix confiaient ainsi n'avoir lu aucun livre dans l'année et quatre sur dix déclaraient lire moins qu'avant. Quant à la diversité des lectures, elle s'appauvrit également dangereusement, l'essentiel des ventes se concentrant de plus en plus sur quelques best-sellers. Guillaume Musso ou Harlan Coben occupent l'espace quand nombre d'écrivains reconnus survivent à 500 exemplaires.
Fleuron contemporain de la biodiversité littéraire, l'Américain Philip Roth confiait récemment son pessimisme au journal Le Monde : « Je peux vous prédire que dans les trente ans il y aura autant de lecteurs de vraie littérature qu'il y a aujourd'hui de lecteurs de poésie en latin. » Faut-il préciser que dans son pays, selon une étude pour le National Endowment for the Arts, un Américain sur deux n'avait pas ouvert un seul livre en 2014 ? En début d'année, dans Télérama, l'Anglais Will Self y allait lui aussi de son pronostic : « Dans vingt-cinq ans, la littérature n'existera plus. » Faut-il croire ces oiseaux de mauvais augure ? Le lecteur serait-il carrément en voie de disparition ? Et le roman destiné au plaisir d'une petite coterie de lettrés ? Mauvaise passe ou chronique d'une mort annoncée ?
La baisse de la lecture régulière de livres est constante depuis trente-cinq ans, comme l'attestent les enquêtes sur les pratiques culturelles menées depuis le début des années 1970 par le ministère de la Culture. En 1973, 28 % des Français lisaient plus de vingt livres par an. En 2008, ils n'étaient plus que 16 %. Et ce désengagement touche toutes les catégories, sans exception : sur la même période, les « bac et plus » ont perdu plus de la moitié de leurs forts lecteurs (26 % en 2008 contre 60 % en 1973). Si l'on observe les chiffres concernant les plus jeunes (15-29 ans), cette baisse devrait encore s'aggraver puisque la part des dévoreurs de pages a été divisée par trois entre 1988 et 2008 (de 10 % à 3 %).
La lecture de livres devient minoritaire, chaque nouvelle génération comptant moins de grands liseurs que la précédente. Contrairement aux idées reçues, ce phénomène est une tendance de fond, antérieure à l'arrivée du numérique. « Internet n'a fait qu'accélérer le processus », constate le sociologue Olivier Donnat, un des principaux artisans de ces enquêtes sur les pratiques culturelles. Pour lui, « nous vivons un basculement de civilisation, du même ordre que celui qui avait été induit par l'invention de l'imprimerie. Notre rapport au livre est en train de changer, il n'occupe plus la place centrale que nous lui accordions, la littérature se désacralise, les élites s'en éloignent. C'est une histoire qui s'achève ».
La lecture de romans devient une activité épisodique. En cause, le manque de temps ou la concurrence d'autres loisirs.
La population des lecteurs réguliers vieillit et se féminise. Il suffit d'observer le public des rencontres littéraires en librairie. « La tranche d'âge est de 45-65 ans, note Pascal Thuot, de la librairie Millepages à Vincennes. Et les soirs où les hommes sont le plus nombreux, c'est 20 % maximum. » Les statistiques le confirment : chez les femmes, la baisse de la pratique de la lecture s'est en effet moins traduite par des abandons que par des glissements vers le statut de moyen ou faible lecteur. Dans les autres catégories, la lecture de romans devient une activité épisodique, un passe-temps pour l'été ou les dimanches de pluie. En cause, le « manque de temps » (63 %) ou la « concurrence d'autres loisirs » (45 %), comme le montre l'enquête Ipsos/Livres ­Hebdo. La multiplication des écrans, les sollicitations de Facebook, la séduction de YouTube, l'engouement pour des jeux comme Call of duty ou Candy Crush, le multitâche (écouter de la musique en surfant sur Internet) ne font pas bon ménage avec la littérature, qui nécessite une attention soutenue et du temps.
Du côté des éditeurs, ce sont d'autres chiffres qui servent de baromètre. Ceux des ventes, qui illustrent à leur manière le même phénomène de désengagement des lecteurs. Certes les best-sellers sont toujours présents au rendez-vous. Ils résistent. Et les Marc Levy, David Foenkinos ou Katherine Pancol font figure de citadelles. Si massives qu'elles occultent le reste du paysage, qui s'effrite inexorablement : celui de la littérature dite du « milieu », c'est-à-dire l'immense majorité des romans, entre têtes de gondole et textes destinés à quelques amateurs pointus. Pascal Quignard peine ainsi à dépasser les 10 000 exemplaires, le dernier livre de Jean Echenoz s'est vendu à 16 000, Jean Rouaud séduit 2 000 à 3 000 lecteurs, à l'instar d'Antoine Volodine. Providence, le dernier livre d'Olivier Cadiot, s'est vendu à 1 400 exemplaires et le dernier Linda Lê, à 1 600 (chiffres GfK).
Quant aux primo-romanciers, leurs ventes atteignent rarement le millier d'exemplaires en comptant les achats de leur mère et de leurs amis. « Oui, les auteurs qui vendaient 5 000 livres il y a quelques années n'en vendent plus que 1 000 ou 2 000 aujourd'hui. Et le vivent très mal », résume Yves Pagès, le patron des éditions Verticales. D'autant plus qu'à la baisse des ventes les éditeurs ont réagi en multipliant les titres pro­posés. De moins en moins de lecteurs, de plus en plus de livres ! Entre 2006 et 2013, la production de nouveaux titres a ainsi progressé de 33 %, selon une étude du Syndicat national de l'édition. Comment s'étonner alors que le tirage moyen des nouveautés soit en baisse, sur la même période, de 35 % ?
“L'auteur est le Lumpenproletariat d'une industrie culturelle qui est devenue une industrie du nombre.” – Sylvie Octobre, sociologue
La multiplication des écrivains est un autre effet mécanique de cette surproduction. Le ministère de la Culture recense aujourd'hui 9 500 « auteurs de littérature » qui doivent se partager un gâteau de plus en plus petit. Paupérisés, jetés dans l'arène de « rentrées littéraires » de plus en plus concurrentielles — cette année, 589 romans français et étrangers —, confrontés à l'indifférence quasi générale, les écrivains font grise mine. Ou s'en amusent, bravaches, à l'instar de François Bégaudeau, qui met en scène dans La Politesse (éd. Verticales), son irrésistible dernier roman, un auteur en butte aux questions de journalistes qui ne l'ont pas lu, aux chaises vides des rencontres en librairie, à la vacuité de salons de littérature où le jeu consiste à attendre des heures, derrière sa pile de livres, d'improbables lecteurs fantômes.
Désarroi, humiliation, découragement : « L'auteur est le Lumpenproletariat d'une industrie culturelle qui est devenue une industrie du nombre », tranche la sociologue ­Sylvie Octobre. Editeur, Yves Pagès nuance évidemment : « Heureusement, il y a des contre-exemples qui soulignent l'intérêt de défendre un auteur sur la durée : Maylis de Kerangal, qui vendait moins de 1 000 exemplaires, a vendu Réparer les vivants à 160 000 exemplaires en grand format. » Pour éviter la catastrophe, les auteurs doivent ainsi, selon lui, faire attention à ne pas devenir des « machines néolibérales concurrentielles, s'enfumant les uns les autres sur de faux chiffres de vente ». Et surtout être lucides, et « sortir du syndrome Beckett-Lady Gaga. Il faut choisir son camp : on ne peut pas écrire comme Beckett et vendre autant que Lady Gaga ».


De tout temps, les écrivains se sont plaints de ne pas vendre suffisamment. « A la sortie de La Naissance de la tragédie, Nietzsche n'en a vendu que 200 exemplaires et Flaubert n'avait pas une plus grande notoriété que celle de Pascal Quignard aujourd'hui, remarque la sémiologue Mariette Darrigrand, spécialiste des métiers du livre. Nos comparaisons sont simplement faussées quand on prend le XXe siècle comme référent, qui était, de fait, une période bénie pour le livre. » A croire selon elle que nous assisterions moins à une crise du livre qu'à un simple retour à la normale, après un certain âge d'or de la littérature, une parenthèse ouverte au XIXe siècle avec la démocratisation de la lecture et le succès des romans-feuilletons d'Alexandre Dumas, de Balzac ou d'Eugène Sue. Elle se serait refermée dans les années 1970-1980, avec la disparition de grandes figures comme Sartre ou Beckett et la concurrence de nouvelles pratiques culturelles (télévision, cinéma, Internet...).
« La génération des baby-boomers entretenait encore un rapport à la littérature extrêmement révérencieux, confirme la sociologue Sylvie Octobre. Le parcours social était imprégné de méritocratie, dont le livre était l'instrument principal. Cette génération considérait comme normal de s'astreindre à franchir cent pages difficiles pour entrer dans un livre de Julien Gracq. Aujourd'hui, les jeunes font davantage d'études mais n'envisagent plus le livre de la même façon : ils sont plus réceptifs au plaisir que procure un texte qu'à son excellence formelle et ne hissent plus la littérature au-dessus des autres formes d'art. »
Aujourd'hui, en France, trois films sur dix sont des adaptations littéraires.
La majorité des auteurs d'aujourd'hui, comme Stendhal en son temps, devraient ainsi se résoudre à écrire pour leurs « happy few » — constat qui n'a rien de dramatique en soi : « Est-ce qu'il y a plus de cinq mille personnes en France qui peuvent vraiment se régaler à la lecture d'un livre de Quignard ? J'en doute, mais c'est vrai de tout temps : une oeuvre importante, traversée par la question du langage et de la métaphysique, n'a pas à avoir beaucoup plus de lecteurs, estime Mariette Darrigrand. Certains livres continuent de toucher le grand public, comme les derniers romans d'Emmanuel Carrère ou de Michel Houellebecq, mais pour des raisons qui tiennent souvent davantage au sujet traité qu'aux strictes qualités littéraires. »
L'appétit pour le récit, la fiction est toujours là, lui, qui se déplace, évolue, s'entiche de nouvelles formes d'expression plus spectaculaires ou faciles d'accès. Aujourd'hui, en France, trois films sur dix sont des adaptations littéraires. « La génération née avec les écrans perd peu à peu la faculté de faire fonctionner son imaginaire à partir d'un simple texte, sans images ni musique, constate Olivier Donnat. On peut le regretter, mais elle trouve aussi le romanesque ailleurs, notamment dans les séries télé. » Dans la lignée de feuilletons littéraires du xixe siècle, Homeland ou The Wire fédèrent de nos jours plus que n'importe quel ou­vrage de librairie. De l'avis gé­néral, la série télé serait devenue « le roman populaire d'aujourd'hui » (Mariette Darrigrand), la forme « qui s'adresse le mieux à l'époque » (Xabi Molia), parlant de front à toutes les générations, à tous les milieux sociaux ou culturels, avec parfois d'heureuses conséquences (inattendues) sur la lecture (voir le succès des tomes originels de Game of thrones, de George R.R. Martin, après la diffusion de leur adaptation sur HBO).
En cinquante ans, l'environnement culturel s'est élargi, étoffé, diversifié, au risque de marginaliser la littérature et l'expérience poétique. « Ma génération a grandi sur les ruines d'une période particulièrement favorable au livre, dit François Bégaudeau. Ce n'est pas une raison pour pleurer. Moi je viens de la marge, d'abord avec le punk-rock puis avec l'extrême gauche, j'ai appris à savourer la puissance du mineur : assumons-nous comme petits et minoritaires, serrons-nous les coudes entre passionnés de littérature, écrivons de bons livres et renversons l'aigreur en passion joyeuse. » Car la créativité est toujours là : l'éditeur Paul Otchakovsky-Laurens dit recevoir chaque année des manuscrits meilleurs que les années précédentes. Et le libraire Pascal Thuot s'étonne moins du nombre de titres qu'il déballe chaque année des cartons (environ dix mille) que de leur qualité. « Il ne faut pas sombrer dans le catastrophisme : si les ventes baissent, la littérature française reste en excellente santé, assure Yves Pagès. Sa diversité a rarement été aussi forte et reconnue à l'étranger. »
Tous espèrent simplement que ce bouillonnement créatif ne tournera pas en vase clos, à destination d'un public confidentiel de dix mille lecteurs résistants, mais trouvera de nouveaux relais et un accueil plus large chez les jeunes. Mais comment séduire les vingtenaires avec des romans à 15 euros quand le reste de la production culturelle est quasiment gratuite sur Internet ? « A la différence des séries télé, les romans sont difficiles à pirater, c'est ce qui les sauve et en même temps les tue », note Xabi Molia. Pour survivre, le roman doit faire sa mue à l'écran, s'ouvrir aux nouveaux usages, chercher à être plus abordable (sans céder sur l'exigence), notamment sur Internet où les prix restent prohibitifs. Peut-être alors ne sera-t-il pas condamné au sort de la poésie en latin...